Bélanger Paradis Avocats - Cabinet d'avocats - Montréal - Boucherville

Au service des entrepreneurs en construction.

REVUE JURISPRUDENTIELLE AOÛT 2016

Divers sujets d’intérêt ont été traités par les Tribunaux depuis le début de l’année 2016.

 Il importe donc de faire sommairement le point de 2 décisions qui intéresseront particulièrement les entrepreneurs en construction.

Les Équipements Yves Landry Inc. c. Ville de Gaspé (Cour d’Appel);

Essentiellement, cette décision traite de la notion «d’utilité publique» d’un immeuble.

Les Équipements Yves Landry Inc. a agi à titre de fournisseur de matériaux, pour le sous-traitant électricien engagé par l’Entrepreneur général, qui réalise la construction d’un immeuble, propriété de la Ville de Gaspé, au bénéfice de divers organismes communautaires.

Le fournisseur, étant impayé, procède à la publication dans les délais prévus au Code civil du Québec de son avis d’hypothèque légale et de son préavis d’exercice sur l’immeuble détenu par la Ville de Gaspé. Il intente par la suite une requête en délaissement forcé et vente sous contrôle de justice contre la Ville de Gaspé pour récupérer son dû. La Ville quant à elle demande à ce que l’avis d’hypothèque légale et le préavis soient radiés puisque l’immeuble qui a fait l’objet des travaux «est affecté à l’utilité publique».

Il est essentiel de se rappeler qu’un bâtiment qui est affecté à l’utilité publique ne peut pas faire l’objet d’une hypothèque légale, ni être saisi. C’est le cas par exemple d’une caserne de pompier, de la Mairie etc.

Mais qu’en est-il d’un centre communautaire dont la Ville est propriétaire, mais qui peut être loué ou prêté à des individus, des entreprises privées et des organismes communautaires ?

Les Juges de la Cour d’Appel, après avoir étudié l’entente entre la Ville et l’un des organismes communautaires en viennent à la conclusion que l’affectation de l’immeuble en litige répond à de nombreux besoins de la population de la Ville et qu’il doit donc être considéré comme étant affecté à l’utilité publique et qu’il ne peut pas faire l’objet d’un avis d’hypothèque légale.

Dans le cadre de travaux pour le gouvernement et les municipalités sur un immeuble affecté à l’utilité publique, les sous-traitants et fournisseurs ont donc tout intérêt à vérifier dès le début du projet l’existence et les conditions d’un cautionnement pour le paiement de leurs travaux et matériaux, puisqu’aucun avis d’hypothèque légale ne pourra être valablement publié en cas de non-paiement par l’entrepreneur général…

Les Excavations Gilbert Théorêt Inc. c. Ville de Montréal (Cour Supérieure)

Il est de plus en plus fréquent de voir des clauses de pénalité en cas de retard causé par un entrepreneur dans divers contrats, notamment avec les municipalités.

L’objectif du donneur d’ouvrage est clair : forcer l’entrepreneur à respecter le délai d’exécution des travaux prévu au contrat, à défaut de quoi l’entrepreneur devra verser une somme déterminée à l’avance par jour de retard.

Premièrement, l’entrepreneur qui ne respecte pas le délai d’exécution devra être en mesure d’établir que le retard a été causé par le donneur d’ouvrage pour éviter l’application de la clause de pénalité.

Cependant, si les retards sont imputables à l’entrepreneur, peut-il contester la validité de la clause pénale en plaidant qu’elle est abusive? Rendue à cette étape, le Tribunal retient plusieurs facteurs d’analyse pour étudier la possibilité d’annuler ou de réduire une clause pénale :

Durée du contrat 140 jours, plus 35 jours de retard imputable à l’Entrepreneur;

  • Valeur du contrat vs. Coût des pénalités (7,5M$ vs 210 000$ de pénalité);
  • Forces économiques en présence (de l’entrepreneur et la Ville);
  • Comportement du donneur d’ouvrage dans l’application de la pénalité (qui a fait preuve d’une certaine souplesse dans l’application de la clause pénale).

Au final, la Juge après considération des facteurs susmentionnés, a conclu que la clause pénale n’était pas abusive, et qu’en conséquent elle ne pouvait donc pas être annulée ou réduite. L’entrepreneur a été tenu responsable du paiement de la pénalité.

L’entrepreneur qui soumissionne sur un projet doit donc s’assurer qu’il sera en mesure de réaliser les travaux selon l’échéancier demandé par le donneur d’ouvrage et de bien comprendre la portée d’une clause pénale en cas de retard. Également, si des retards surviennent par la faute du donneur d’ouvrage, l’entrepreneur se doit de bien documenter son dossier pour établir qu’il n’est pas responsable des dépassements des délais.

Par Jean-Raymond Paradis


Source: Les Bâtisseurs de la Montérégie (ACQ Montérégie) août 2016

Page précédente

Trucs et conseils juridiques